Des outils pour mettre en oeuvre la séquence "éviter – réduire – compenser" (ERC)

Préserver la biodiversité et les services qu'elle nous rend demande une évolution des pratiques liées à certaines activités humaines. La séquence "éviter – réduire – compenser "(ERC) porte en particulier sur la planification et les projets d'aménagement du territoire. Un ensemble d'outils permet de comprendre la réglementation associée à ces projets, et de l'appliquer via des référentiels techniques et ouvrages méthodologiques.

Préserver les espèces de faune et de flore, les milieux naturels, de même que les fonctions et les services associés à ces écosystèmes, nécessite d’adapter voire de modifier certaines pratiques en matière d’aménagement du territoire, de conception et de budgétisation des projets, de réalisation des chantiers, et de mise en œuvre de certaines activités humaines.
À cette fin, la séquence "éviter – réduire – compenser "(ERC) constitue le fil conducteur d'intégration de l'environnement au sein :

  • des documents de planification (SRADDET, PLU, Sdage, Sage, PGRI, etc.)
  • des projets tels que les infrastructures de transport, les ZAC, les zones industrielles, les carrières, les travaux d'entretien de milieux naturels, les parcs photovoltaïques ou éoliens, les activités de loisir, etc. L'ensemble de ces projets est susceptible d’altérer, de dégrader voire de détruire des milieux naturels, des espèces végétales et animales, des fonctions, des services écosystémiques, etc.

Utiliser ERC pour réduire l'impact des projets d’aménagement du territoire

Dans le cas des projets d’aménagement du territoire, la séquence ERC se traduit techniquement par un séquençage des choix techniques à effectuer par les maîtres d’ouvrage pour leurs projets, et ce, au regard des enjeux environnementaux. Ce séquençage comprend 3 étapes successives.

  1. Chercher toutes les alternatives permettant d’éviter les atteintes à la biodiversité et aux services écosystémiques que le projet pourrait engendrer.
  2. À défaut, proposer des mesures permettant de réduire, au droit du projet, les atteintes qui n’ont pu être suffisamment évitées.
  3. En dernier lieu, compenser les atteintes notables à l’environnement qui n’ont pu être ni évitées ni suffisamment réduites, en réalisant des actions favorables à l’environnement.
    Cette contrepartie est apportée aux impacts notables et négatifs du projet sur les milieux naturels. Elle doit cibler les mêmes composantes (en termes d’espèces, d’habitats et de fonctions) que celles altérées, dégradées voire détruites par le projet.

Ces 3 étapes s’appliquent tout au long de la "vie" du projet, des phases amont de conception et de budgétisation, aux phases d’instruction, de chantier puis de mise en service (ou d'exploitation).
Elles nécessitent au préalable de réaliser un état initial des milieux naturels directement et indirectement concernés par le projet, comprenant notamment une évaluation :

  • de leurs fonctions physiques, bio-géochimiques et biologiques,
  • de leurs services de régulation, d'approvisionnement et culturels, l'ensemble constituant des facteurs de bien-être pour la société (sécurité, santé, cadre de vie, apport de nourriture, relations sociales, etc.),
  • et de leurs enjeux (statut de protection, typicité, degré de menace, etc.).

Cadre réglementaire et périmètre d'application

La séquence « éviter, réduire, compenser » est inscrite dans le corpus législatif et réglementaire français depuis la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature. Elle vise la conception puis la réalisation de plans, programmes et projets d’aménagement du territoire de « moindre impact ». Elle constitue à ce titre pour les maîtres d’ouvrage une déclinaison technique des engagements pris par la France vis-à-vis de l’Europe, en termes notamment de non dégradation supplémentaire de l’état des eaux (Directive cadre sur l’eau, 2000), des milieux marins (Directive cadre stratégie pour le milieu marin, 2008), et de maintien en bon état de conservation des espèces protégées (Directive « habitat, faune, flore », 1992).

La séquence ERC s’applique à l’ensemble des composantes de l’environnement (article L.122-1 du code de l’environnement).

Dans le cas particulier des milieux naturels, elle a été confortée par la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages du 08 août 2016 comme suivant : « éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu’elle fournit ; à défaut, d’en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n’ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ».

L'article L.110-1 du code de l’environnement introduit les principes généraux de la séquence ERC (Eviter – Réduire – Compenser) qui vise à contribuer à répondre aux engagements internationaux et communautaires de la France en matière de préservation des milieux naturels (Stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable 2015-2020).

Comprendre la séquence ERC, de la réglementation à l'application concrète

Un ensemble de ressources organisées sont mises à disposition via 2 outils principaux.

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Accueil du centre de ressources ERC-Biodiversité

Le centre de ressources ERC Biodiversité

Piloté par l’Office français de la biodiversité (OFB), le centre national de ressources ERC-Biodiv donne accès à des informations et des outils visant à mieux comprendre et appliquer la séquence « éviter, réduire, compenser (ERC) » sur le volet biodiversité (espèces, milieux naturels, fonctions et services associés). Ces éléments sont relatives aux documents de planification et aux projets d’aménagement du territoire soumis à évaluation environnementale.
Ce sont des documentations, réglementations, jurisprudences, méthodes, outils et retours d’expériences favorisant une application vertueuse de la séquence ERC et des mesures de suivi et d’accompagnement qui la complètent.

À vocation pédagogique, ce site a pour finalité d’accompagner techniquement les acteurs pour la mise en œuvre des politiques publiques et dans leur montée en compétences. Il s'adresse prioritairement des acteurs professionnels d’ERC :

  • internes : agents de l’OFB en charge de l’appui technique et du contrôle des mesures ERC,
  • et externes : services instructeurs de l’État, maîtres d’ouvrage, bureaux d’étude, collectivités...
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Accueil de PatBiodiv

Patbiodiv, la plateforme d’appui technique Biodiversité

L’application web Pat Biodiv s'adresse à de multiples utilisateurs :

  • internes (OFB) ou rattachés à l’OFB (Parcs nationaux),
  • externes :
    • partenaires : services déconcentrés de l’État, MNHN, Inrae, Cerema...,
    • maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre, bureaux d’étude, collectivités...

Elle est composée de deux volets :

  • une base documentaire technique et réglementaire ouverte à tous, déclinant la séquence ERC par type d’opérations,
  • une partie réservée aux agents de l’OFB et des parcs nationaux, permettant la gestion des actes produits par ces établissements : avis techniques, délibérations des parcs naturels marins, décisions des parcs nationaux.

Une base documentaire de référentiels techniques et textes réglementaires ouverte à tous

Les référentiels techniques rassemblent ainsi des fiches techniques et méthodologiques relatives aux attendus des études d’incidences des projets, en lien avec les décisions en cœur de Parc national et avec les demandes d’appui technique.
Le module est organisé par :

  • domaines : aquatique, marin ou terrestre,
  • puis par thèmes : travaux en cours d'eaux par exemple,
  • et natures d’opérations : type busage de cours d'eau.

Les natures d’opération font l’objet d’un jeu de fiches techniques distinctes traitant de l’état initial, des impacts et incidences sur les milieux, des suivis. Pour les natures d’opérations instruites par les Parcs nationaux, des fiches relatives aux données administratives et caractéristiques du projet sont également disponibles.
Au sein de ces fiches techniques, le recours à des démarches, des protocoles ou des espèces renvoient à des fiches méthodologiques dédiées.

À noter : les éléments du référentiel technique actuellement accessibles à tous concernent les thèmes de continuité, hydroélectricité et vidanges/chasses du domaine aquatique. D'autres sont disponibles en accès réservé.

Une partie textes réglementaires rassemble les textes qui régissent l’instruction des autorisations requises pour les activités impactant la biodiversité, ou l’appui technique à ces instructions.
Ces textes sont classés :

  • selon les entrées : milieux et espèces, arrêtés ministériels, procédures d’instruction ou encore documents de planification,
  • une rubrique rassemble tous les textes concernant les parcs nationaux, depuis leurs décrets de création jusqu’aux réglementations en vigueur sur leurs territoires, et une autre concerne les parcs naturels marins. 

Ces différentes entrées permettent à tout usager et particulièrement aux agents ayant des missions de police administrative, ou d’instruction de demandes d’autorisation d’activités, de trouver selon leur situation l’ensemble du corpus réglementaire.

La gestion des actes produits par l’OFB et les Parcs nationaux en interne

Le volet de gestion des actes concerne les avis techniques, délibérations des parcs naturels marins, et décisions des parcs nationaux.
Il permet de suivre leur traitement et de les bancariser. Pour cela, il comprend un tableau de bord et un processus de suivi des actes, depuis leur enregistrement jusqu’à la signature et l’envoi.

Particularités de la mise en œuvre d’ERC pour des sujets spécifiques

Compensation écologique

Lorsque des atteintes à la biodiversité sont prévues dans le cadre d’un projet ou d’un aménagement à venir, des mesures de compensation doivent être apportées pour contrebalancer ces atteintes et rechercher une absence de perte nette de biodiversité.
Ces mesures de compensation doivent apporter des améliorations sur des composantes équivalentes à celles qui vont être altérées, et à proximité fonctionnelle (pour « remplacer » les fonctionnalités altérées).

Ces mesures de compensation font partie intégrante du projet et sont sous la responsabilité des maîtres d’ouvrage, qui doivent les prévoir dans leur dossier de demande d’autorisation. Elles sont inscrites en tant que prescriptions dans l’acte d’autorisation d’un projet, ce qui en permet le contrôle.

Deux modalités possibles pour réaliser la compensation :

  • directement par le maître d’ouvrage ou son prestataire : compensation à la demande,
  • par acquisition d’unités de compensation générées par des opérateurs de compensation sur des sites naturels de compensation : compensation par l’offre.

Dommage écologique et réparation ou compensation écologique | Page éditoriale

La prise en compte des dommages écologiques reste difficile et la réparation des préjudices qui en découlent peu nombreuses ou mal proportionnées. Pour le juge qui ordonne la réparation de ces atteintes, la priorité est donc de caractériser et évaluer les dommages écologiques qui découlent des infractions constatées par les inspecteurs de l’environnement. Cette page rassemble les ressources et travaux produits sur le sujet.

Dimensionnement de la compensation

Dimensionnement ex ante de la compensation des atteintes à la biodiversité - État de l’art des approches, méthodes disponibles et pratiques en vigueur | Comprendre pour agir | juin 2020

L'harmonisation des pratiques en matière de dimensionnement ex ante de la compensation des atteintes à la biodiversité via le " développement d'une approche standardisée " constitue une volonté forte de l'État (action 90 du plan Biodiversité - MTES, 2018). Afin d'y répondre, cette étude dresse une typologie des méthodes disponibles, présente un état de l'art des pratiques en vigueur,et propose des pistes de réflexion en matière de dimensionnement de la compensation.

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Approche standardisée du dimensionnement de la compensation écologique - Guide de mise en oeuvre | Guide | mai 2021

Le principe de la séquence éviter-réduire-compenser (ERC) est fondateur pour concilier protection de la biodiversité, développement économique et aménagement du territoire. Ce guide propose un cadre national pour concevoir et dimensionner les mesures de compensation écologique. Il vise à contribuer à l’harmonisation et l’amélioration des pratiques, et à renforcer l’efficience de la mise en oeuvre de la séquence ERC.

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Film présentant l’approche standardisée du dimensionnement de la compensation (OFB, Cerema)

Compensation écologique des cours d’eau. Exemples de méthodes de dimensionnement (CGDD, Cerema, AFB)
Cet ouvrage technique présente des méthodes de dimensionnement de la compensation écologique spécifiques aux cours d’eau, utilisées aux États-Unis. Elles permettent de comparer pertes écologiques engendrées par un projet et gains écologiques liés à la mise en œuvre de mesures de compensation. Les méthodes sont analysées, puis les possibilités de transposition au contexte français étudiées.

Modèles de rédaction des prescriptions spécifiques aux mesures de compensation

Modèles de rédaction des prescriptions spécifiques aux mesures de compensation
Cet ouvrage s’adresse plus particulièrement aux services instructeurs en charge de rédiger les actes administratifs d’autorisation des projets soumis à la loi sur l’eau. Il rappelle les points de vigilance pour assurer la sécurité juridique des actes administratifs et propose 2 modèles de rédaction.

Compensation par l’offre

Des opérateurs de compensation génèrent des unités de compensation par leur actions de restauration de la biodiversité sur des sites naturels de compensation. Cette modalité permet de mettre en œuvre la compensation de manière anticipée et mutualisée, et ainsi d’améliorer son efficacité.
Un agrément ministériel atteste la nature et la quantité d’unités écologiques disponibles sur ces sites.

À partir de l’analyse des expérimentations de sites de compensation menées entre 2008 et 2020, l’Inrae a élaboré des critères d’analyse pour évaluer la pertinence des sites de compensation. La grille d’évaluation de la pertinence écologique (Gepe) permet :

  • aux porteurs de projets de compensation par l’offre d'évaluer la pertinence écologique de leur projet à toutes les étapes de son élaboration,
  • et aux services instructeurs de l'État d'évaluer un projet sollicitant un agrément à ce titre.

Cette grille est composée de 34 critères pour 2 volets :

  • s’assurer de la complétude du dossier : état initial, objectifs, composantes de biodiversité ciblées…,
  • analyser le fond et en particulier la nature, l’ampleur et la probabilité d’obtenir le gain écologique visé.

Le Guide pour l’élaboration d’un site naturel de compensation (CGDD, 2023) accompagne le déploiement de ces sites et s'adresse aux opérateurs de compensation et services instructeurs. Il explique le dispositif, propose des éléments méthodologiques et aide à la constitution du dossier de demande d’agrément ministériel.

Suivi des mesures de compensation dans le temps

L'outil GéoMCE est à disposition des services instructeurs pour enregistrer les mesures de compensation liées à un projet ainsi que les prescriptions afférentes. Une extraction de cet outil est visualisable par le grand public sur le Geoportail de l’IGN.

Inventaire des sites à fort potentiel de gain écologique : l'application Pogéis

Les maîtres d’ouvrage de projets rencontrent une difficulté majeure : la recherche de sites disponibles pour réaliser des mesures de compensation. Aussi la loi de reconquête de la biodiversité de 2016 a-t’elle confié à l’OFB la réalisation d’un inventaire de sites à fort potentiel de gain écologique. En effet, l’existence d’un potentiel de gain écologique, ou plus simplement dit d’une marge de progrès, est la condition première pour qu’un site puisse recevoir une mesure de compensation.
L’OFB, avec l’appui de groupes de travail regroupant l’ensemble des acteurs concernés par le sujet, élabore l'application "Pogéis" : elle permettra de réaliser un inventaire de sites de manière collaborative. Ils pourront faire l’objet de projets de restauration écologique, élaborés dans le cadre réglementaire de la compensation écologique ou dans tout autre cadre (engagement volontaire de restauration des écosystèmes, contrat Natura 2000, etc.).

Pogéis, l'inventaire des sites à fort potentiel de gain écologique | Projet | Mis à jour le 26/07/23

Le projet Pogéis porte sur l'inventaire des sites à potentiel de gain écologique, c'est-à-dire susceptible de voir leur état ou fonction écologique s'améliorer grâce à des actions de génie écologique ou certaines pratiques de gestion. L'application web permettra de réaliser un inventaire de manière collaborative, incluant les spécificités des sites. Élaborée par l’Office français de la biodiversité (OFB) avec l’ensemble des acteurs concernés, elle sera déployée au printemps 2024.

Logo Pogéis, OFB