Damier de la Succise (Euphydryas aurinia)
Le Damier de la Succise est un papillon qui fréquente les formations herbacées dans différents types de milieux ouverts (prairies humides, tourbières, pelouses sèches, clairières forestières…). Dans les milieux humides, les chenilles se nourrissent principalement de Succise des prés, plante vivace largement répandue et pouvant former des plages denses.
Nom
Classification : Arthropoda / Insecta / Lepidoptera / Nynphalidae / Melitaeini / Euphydryas |
Statuts de conservation (listes rouges UICN)
Statut réglementaire : réglementée |
C’est une espèce très variable, pour laquelle beaucoup de sous-espèces et de formes ont été décrites. Le taxon peut être considéré comme une super-espèce en voie de différenciation avec des taxons géographiquement distincts qui utilisent des habitats et des plantes-hôtes différentes.
Cette fiche concerne principalement la sous-espèce aurinia qui couvre une large partie de la France.
À noter Les valeurs présentées dans cette fiche sont données à titre indicatif et peuvent varier en fonction des conditions climatiques, de l'altitude et de la latitude, et des caractéristiques propres à chaque population. |
Habitat
Un papillon des milieux ouverts
Le Damier de la Succise fréquente les formations herbacées hygrophiles à mésophiles, où se développent ses plantes hôtes. Ce papillon se retrouve donc dans différents types de milieux ouverts (prairies humides, tourbières, pelouses sèches, clairières forestières…), le plus souvent en situation d’écotone (zone de contact entre deux écosystèmes), à proximité d’une bordure plus ou moins boisée (lisières, haies bocagères…).
En lien avec le développement de ses plantes hôtes, le Damier de la Succise est très sensible à l’évolution de son habitat en termes de structure et de composition. Ainsi, les pratiques agricoles pastorales, les modalités de fauche ou encore l’abandon de ces pratiques agropastorales ont un rôle déterminant dans la structure de l’habitat du Damier de la Succise.
La Succise des prés (Succisa pratensis) est la plante-hôte principale des chenilles de la sous-espèce nominale, largement répandue en France.
D’autres plantes hôtes peuvent cependant être utilisées, en particulier sur les pelouses calcicoles, notamment la Scabieuse colombaire (Scabiosa columbaria) et la Knautie des champs (Knautia arvensis).
Cette plante-hôte est utilisée à différents stades larvaires par les chenilles, pour leur consommation ou établir des nids (voir partie Reproduction).
Types d’habitats associés
- Typologie Eunis : E3.5 - Prairies oligotrophes humides ou mouilleuses / F4.1 - Landes humides / D1.1 - Tourbières hautes / D4 - Bas-marais riches en bases et des tourbières des sources calcaires
- Corinne Biotope : 37.3 - Prairies humides oligotrophes / 31.1 - Landes humides européennes / 51 - Tourbières hautes / 54 - Bas-marais, tourbières de transition et sources
Cycle de vie (alimentation, reproduction, paramètres démographiques...)
Alimentation : des chenilles au adultes
Dans les milieux humides, les chenilles se nourrissent principalement de Succise des prés, plante vivace largement répandue et pouvant former des plages denses. Elle est sensible aux nitrates et aux phosphates et disparaît des prairies engraissées.
Les adultes butinent la plupart des plantes nectarifères qu’ils rencontrent.
Reproduction et cycle larvaire : un nid collectif pour des chenilles grégaires
Les chenilles sont grégaires. Elles consomment les feuilles de la plante-hôte et s’abritent dans un nid collectif de soie, déplacé au fur et à mesure de la consommation des feuilles.
La diapause hivernale débute en fin d’été alors que les chenilles ont atteint le quatrième stade larvaire et ont tissé un nid de soie assez dense sur leur plante hôte. Lors de la nymphose, la chrysalide est suspendue dans la végétation basse.
Au printemps, elles reprennent leur activité après la diapause hivernale et elles sont visibles se réchauffant au soleil sur la végétation. Elles se dispersent ensuite et poursuivent, seules, leur développement jusqu’au sixième stade larvaire.
Comportement (mode de vie, déplacement, domaine vital...)
Déplacements
Lors de la phase larvaire, des déplacements peuvent intervenir à l’intérieur du patch d’habitat favorable, à la recherche des meilleures densités de plante hôte.
L’adulte quant à lui pourra effectuer :
- desdéplacements courts à la recherche de sources de nectar,
- ou plus importants en suivant les structures paysagères telles que haies, lisières, allées forestières, prairies fleuries…
Le rayon de dispersion est de l’ordre de 1 à 2 km, mais des mouvements de plusieurs kilomètres sont parfois observés.
Obstacles
La disparition des habitats favorables et des structures paysagères associées est un frein au déplacement et à la connexion des populations ou sous-populations.
Répartition géographique et situation de l'espèce
Réglementation
Statut juridique
- Statut européen : espèce de faune strictement protégée - Annexe II - Convention de Berne
- Statut communautaire : espèce dont la conservation nécessite la désignation de zones spéciales de conservation - Annexe II - Directive européenne dite Directive Habitats-Faune-Flore (Directive 92/43/CEE)
- Statut national : espèce protégée - Arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes des insectes protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection
Réglementation : précisions l'article 3, arrêté du 23 avril 2007
L’arrêté concernant le Damier de la Succise interdit entre autres toute destruction ou perturbation intentionnelle des insectes à tous les stades de développement. Il est également interdit de détenir, de transporter ou de réaliser toute action commerciale avec des individus prélevés dans le milieu naturel.
Observation, étude et gestion
Méthodes de détection
Pour le suivi optimal des populations de Damier de la Succise, deux méthodes complémentaires sont préconisées :
- repérage initial des colonies reproductrices par l’observation et le comptage directs des adultes durant leur période de vol,
- estimation des effectifs et de leurs variations interannuelles au moyen de la recherche des nids de chenilles en fin d’été (lorsqu’ils se muent en nids hivernaux plus denses et volumineux).
Gestion : à savoir pour tout projet impactant les milieux concernés
- Se renseigner auprès des organismes scientifiques et techniques compétents (établissements publics, associations locales, fédération de pêche, associations naturalistes, bureaux d’études)
- Se rapprocher des services de l'État instructeurs de votre région (services chargés de l'environnement au sein des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DRIEE en Île de France) ou au sein des directions départementales des territoires).
Informations complémentaires et références
Informations complémentaires
- Ministère de l'écologie, du Développement durable et de l’Énergie, 2012, Guide "espèces protégées, aménagements et infrastructures". 65p.
- Évaluation des incidences sur les sites Natura 2000, Centre de ressources Natura 2000.
- Synthèse bibliographique sur les traits de vie du damier de la Succise (Euphydryas aurinia aurinia (Rottemburg, 1775)) relatifs à ses déplacements et à ses besoins de continuités écologiques. 2012
- Fiche espèce - Eurodryas aurinia Rottemburg, 1775 - Cahiers d’habitats Natura 2000. Tome 7
Autres espèces protégées possédant des habitats similaires
- Azuré de la pulmonaire, Maculinea alcon ([Denis & Schiffermüller], 1775)
- Cuivré des marais, Lycaena dispar (Haworth, 1802)
- Fadet des Laîches, Coenonympha oedippus (Fabricius, 1787)
Bibliographie
- Botham, M.S., Ash, D., Aspey, N., Bourn, N. a. D., Bulman, C.R., Roy, D.B., Swain, J., Zannese, A., Pywell, R.F., 2011. The effects of habitat fragmentation on niche requirements of the marsh fritillary, Euphydryas aurinia, (Rottemburg, 1775) on calcareous grasslands in southern UK. Journal of Insect Conservation 15, 269–277.
- Porter, K., Ellis, S., 2011. Securing viable metapopulations of the Marsh Fritillary butterfly, Euphydryas aurinia, (Lepidoptera: Nymphalidae) in Northern England. Journal of Insect Conservation 15, 111–119.
- Smee, M., Smyth, W., Tunmore, M., ffrenchConstant, R., Hodgson, D., 2011. Butterflies on the brink: habitat requirements for declining populations of the marsh fritillary (Euphydryas aurinia) in SW England. Journal of Insect Conservation 15, 153–163.
- Van Halder, I., Jourdain, B., 2010. Les plantes-hôtes du Damier de la succise (Euphydryas aurinia) dans le Sud-Ouest de la France (Lepidoptera, Nymphalidae). Bulletin de la Société Linnéenne de Bordeaux 1, 23–30.
- Junker, M., Schmitt, T., 2010. Demography, dispersal and movement pattern of Euphydryas aurinia (Lepidoptera: Nymphalidae) at the Iberian Peninsula: an alarming example in an increasingly fragmented landscape? Journal of Insect Conservation 14, 237–246.
- Anthes, N., Fartmann, T., Hermann, G., Kaule, G., 2003. Combining larval habitat quality and metapopulation structure – the key for successful management of pre-alpine Euphydryas aurinia colonies. Journal of Insect Conservation 7, 175–185.
- Lafranchis, J., 2003. Fiche Insectes Protégés - Le Damier de la succise. Insectes 130, 13–14.