Point sur la réglementation relative aux pollutions dues aux nitrates et produits phytosanitaires
La réglementation existante pour limiter les pollutions diffuses dues aux nitrates et produits phytopharmaceutiques (PPP) est à la fois volumineuse et complexe, du fait de sa dissémination dans plusieurs codes. Ces normes s’appliquent à tous les utilisateurs de substances chimiques et produits azotés, en premier lieu les agriculteurs, les professionnels agricoles et gestionnaires des jardins, espaces végétalisés et infrastructures (JEVI), les agents des collectivités ainsi que les particuliers.
Encadrement d'utilisation de substances
Produits phytopharmaceutiques (PPP)
Les PPP sont définis comme étant des substances actives et des préparations contenant une ou plusieurs substances actives utilisées pour protéger les plantes ou les produits végétaux contre les organismes nuisibles ou pour prévenir l'action de ces organismes (cf. règlement 1107/2009).
Cadre général (matériels, formations, produits réglementés)
- Contrôle technique du matériel de pulvérisation tous les trois ans depuis le 1er janvier 2021 (cf. D256-13 du Code rural et de la pêche maritime).
- Formation des utilisateurs professionnels, distributeurs et conseillers (Certiphyto).
- Conseil stratégique phytosanitaire (CSP) avant le 31 décembre 2023 pour le renouvellement du Certiphyto (cf. Décret n° 2020-1265 du 16 octobre 2020 relatif au conseil à l'utilisation de produits phytopharmaceutiques et à la certification de leurs distributeurs et utilisateurs professionnels)
- Utilisation obligatoire de préparations phytopharmaceutiques autorisées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Retrouvez la liste ici.
Des interdictions d'utilisation s'appliquent à tous les produits et sont définies dans l'arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l'article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime. Les principales sont :
- Lorsque le vent a un degré d'intensité supérieur ou égal à 4 sur l'échelle de Beaufort.
- Lorsque l'intensité des précipitations est supérieure à 8 mm par heure.
- Application directe sur les éléments du réseau hydrographique.
- Application à moins de 5 mètres d'un point d'eau.
- Leur entraînement hors de la parcelle ou de la zone traitée dans la cas d'une dérive non maîtrisée.
Zones particulières
D'autres règles s'appliquent dans certaines zones liées à la protection de l'environnement et des personnes. Des exemples sont précisés ci-dessous :
Zones non traitée autour des points d’eau
Cet arrêté précise qu’une zone non traitée (ZNT) de 5, 20 ou 50 mètres autour des points d’eau doit être respectée selon le produit utilisé.
Les points d’eau concernés sont :
- Les cours d’eau définis à l'article L215-7-1 du code de l'environnement,
- Les éléments du réseau hydrographique figurant sur les cartes 1/25 000 de l'Institut géographique national (IGN),
- Les points d’eau cartographiés et définis par arrêté préfectoral.
Il est toutefois possible de réduire la largeur de la zone non traitée de 20 à 5 mètres ou de 50 à 5 mètres, en présence d’un dispositif végétalisé (herbacé ou arbustif) permanent d’au moins 5 mètres de large en bordure des points d’eau et en cas d’utilisation d’un matériel permettant de diminuer la dérive de pulvérisation (inscrit au Bulletin officiel du ministère de l'agriculture et de l’alimentation).
Zones non traitée autour des habitations (« ZNT riverains »)
Les distances nationales minimales à respecter entre les zones d’épandage de PPP et les zones d’habitation au sens large sont définies de la manière suivante et s’appliquent uniquement en l’absence d’indication spécifique dans les autorisations de mise sur le marché délivrées par l’Anses :
- 20 mètres incompressiblespour l’épandage des produits les plus dangereux, voire 10 mètres pour certains d'entre eux (cf. Arrêté du 14 février 2023 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de certains produits phytopharmaceutiques et modifiant l’arrêté du 4 mai 2017).
- Pour les autres produits phytopharmaceutiques en milieu non fermé :
- 10 mètres pour le traitement des parties aériennes pour l’arboriculture, la viticulture, les arbres et arbustes, la forêt, les petits fruits et cultures ornementales de plus de 50 cm de hauteur, les bananiers et le houblon,
- 5 mètres pour les autres utilisations agricoles et non agricoles.
En dehors des produits les plus dangereux et pour ce qui concerne les zones d’habitation, ces distances minimales peuvent être réduites dans le cadre de chartes d’engagements approuvées par le Préfet, à la condition d’avoir recours à des moyens de réduction de la dérive (cf. Bulletin officiel du ministère de l'agriculture et de l’alimentation), jusqu’à :
- 5 mètres pour l’arboriculture,
- 3 mètres pour la viticulture et les autres cultures.
Les lieux cités dans l’article L.253-7-1 (personnes vulnérables) ne sont pas visés par la possibilité de réduction de la distance minimale.
Entretien des jardins, espaces végétalisés et infrastructures (JEVI)
Suite à la modification de la loi « labbé », les interdictions initiales d’utilisation ou de faire utiliser des produits phytosanitaires de synthèse, pour l’entretien des espaces verts, des forêts, des voiries ou des promenades accessibles ou ouverts au public, s’appliquent aussi depuis le 01 juillet 2022 aux cimetières et terrains de sport des communes (sauf terrains de sport dont l’accès est limité aux utilisateurs et greens et fairways de golfs).
Elles s'étendent également aux habitations et différents lieux fréquentés par le public ou à usage collectif.
Restrictions prévues dans les autorisations de mise sur le marché
Les utilisateurs doivent également respecter les conditions d’utilisation des produits. Elles sont définies par l’Anses et sont indiquées sur les étiquettes. Ces conditions sont fixées au titre de l’article L253-7 du code rural et de la pêche maritime. Quelques exemples :
- Fréquence, nombre d’applications ou période d’application,
- Zone de non-traitement biodiversité ZNCA (Zone Non Cultivé Adjacente)
- Interdiction d’utilisation :
- sur parcelles drainées,
- sur les surfaces imperméables,
- lorsque les adventices sont en fleur,
- en présence d’insectes pollinisateurs et/ou auxiliaires (abeilles, bourdons, coccinelles, ...).
Nitrates
Cadre général
Les exploitations agricoles localisées en zones vulnérables, établies dans le programme d'actions national (PAN), doivent respectées 8 mesures (dont les périodes d’interdiction d’épandage, l’établissement d’un plan prévisionnel de fumure, la couverture des sols, le maintien d’une bande enherbée de 5 mètres le long des cours d’eau).
Les agents des Directions départementales des territoires - et de la mer (DDT-M) sont chargés du contrôle de ces mesures. Ils peuvent également être accompagnés par les inspecteurs de l’Office français de la biodiversité (OFB).
Mesures renforcées
Les mesures du PAN sont renforcées et complétées dans les programmes d'actions régionaux (PAR) "Nitrates" et les zones d'actions renforcées (ZAR).
Les ZAR comprennent notamment les aires d’alimentation des captages (AAC) dont la teneur en nitrates est supérieure à 50 mg/l.
Pour en savoir plus reportez-vous au PAR de votre région ou contactez les services de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF).
Pratiques conditionnées aux aides de la politique agricole commune (PAC)
Les agriculteurs bénéficiant d’une ou plusieurs aides d'un des deux piliers de la PAC doivent bien évidemment respecter la règlementation en vigueur mais aussi répondre aux exigences relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE).
Elles peuvent concerner par exemple :
- le respect de mesures de protection des habitats naturels de la biodiversité,
- la présence de bande tampon de 5 mètres de large au minimum sans traitement phytopharmaceutique ni fertilisation implantée le long de tous les cours d'eau dits BCAE.
Pour en savoir plus reportez-vous au site du ministère en charge de l'agriculture.
Règlements sanitaires départementaux (RSD) et installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)
Des prescriptions techniques s’appliquent aux exploitations agricoles en fonction de leurs natures et de leurs tailles. Elles visent par exemple à définir des distances d’implantation des bâtiments vis-à-vis des cours d’eau et des zones d’exclusion à l’épandage des effluents d’élevage (plan d’épandage).
Pour en savoir plus contactez les services des Agences régionales de santé (ARS) et des Préfectures.
Aller plus loin
[Replay - webinaire] La réglementation pour limiter les pollutions diffuses : principes et actions de l'OFB | Evénement |
Ce webinaire est dédié à la réglementation existante pour limiter les pollutions diffuses dues aux nitrates et aux produits phytopharmaceutiques (PPP). Il aborde notamment le rôle de l'Office français de la biodiversité (OFB) dans l'application de cette réglementation.
Les cours d’eau concernés par les règles des bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) en 2021 désormais cartographiés | Article - Actualité |
Suite à l’arrêté du 4 février 2021, modifiant celui du 24 avril 2015 relatif aux règles de bonnes conditions agricoles et environnementales, la cartographie des cours d’eau de France métropolitaine concernés par la mise en place de bandes tampons est désormais accessible à tous sur le site géoportail.
Zones tampons et lutte contre les pollutions diffuses - n°44 | Rencontres | janvier 2017
Près de 80 gestionnaires et scientifiques se sont réunis en 2016 pour une journée technique consacrée aux zones tampons. Objectifs : fournir des éléments de connaissance concrets sur ces outils d’aménagement du territoire, questionner les travaux de recherche et évaluer la faisabilité de ces techniques.