Évaluer l’habitat de reproduction du tétras-lyre pour mieux le préserver

Date de publication ou de mise à jour
19/07/2022
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En juillet, la femelle tétras-lyre élève ses poussins qui viennent de naitre, c’est une période cruciale pour la survie de cette espèce de galliformes dont la principale population française se trouve dans les Alpes. Pour préserver son habitat de reproduction et maintenir des conditions favorables à l’élevage des poussins, le réseau Agrifaune propose une méthode de diagnostic de l’habitat permettant de mobiliser des solutions adaptées.

Un espace partagé entre le tétras-lyre...

Oiseau emblématique des Alpes et objet de plusieurs enjeux (de préservation notamment), le tétras-lyre fréquente l’étage subalpin, soit la zone située entre 1400 mètres d’altitude (fin de l’étage forestier) et 2300 mètres (début des pelouses alpines).

Composée de landes à éricacées, de pelouses d’humidité moyenne (dites mésophiles), de fourrés de feuillus, de prés-bois de conifères…, cette zone de transition forme une mosaïque de milieux qui apportent au tétras-lyre refuge et nourriture.

Population de tétras-lyre des Alpes françaises : 14 000 à 20 000 adultes

(Observatoire galliformes de montagne)

...et les activités humaines

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Milieu en mosaïque, habitat de reproduction favorable au tétras-lyre (FDC 38)

Cet espace est aussi utilisé pour diverses activités humaines - agriculture, élevage, tourisme, loisirs… - qui influent sur l’évolution de cette mosaïque. C’est le cas des pratiques pastorales menées par les éleveurs et des aménagements (pistes de ski, sentiers…) réalisés par les gestionnaires d’activités touristiques et récréatives.

Afin de conserver un habitat favorable au tétras-lyre, en particulier au moment de sa reproduction et de l’élevage des jeunes, le groupe technique national Agrifaune "Pratiques pastorales et petite faune de montagne" a élaboré une méthode de diagnostic pour évaluer l’habitat du tétras-lyre. Dans les Alpes, elle est employée depuis 2010 par des acteurs œuvrant à la prise en compte de l’espèce dans les milieux alpins (gestionnaires d’espaces naturels, techniciens des fédérations des chasseurs).

Objectifs et mise en œuvre du diagnostic

Le diagnostic permet de cartographier et qualifier les habitats du tétras-lyre selon 3 catégories :

  • favorables à l’élevage des jeunes galliformes,
  • potentiellement ou moyennement favorables,
  • défavorables.

Selon le type d’habitat identifié, des travaux de réouverture des milieux ou une adaptation des pratiques pastorales, comme l’adaptation du calendrier de pâturage et/ou de la pression pastorale, peuvent être envisagés pour reformer un milieu propice au tétras-lyre.

Quand réaliser le diagnostic ?

Des constantes fondamentales

Le domaine vital d’une poule tétras-lyre pour élever ses poussins est de l’ordre de 20 hectares ; dans les habitats optimaux, il se caractérise par :

  • une strate « herbacée » mésophile dominante (myrtilles et airelles incluses) ;
  • des ligneux en mosaïque dont le taux de recouvrement est compris entre 10 et 50 % ; les ligneux jouant un rôle d'abri ;
  • les ensembles de mailles favorables doivent être distants au maximum de 4 km pour être connectés.

Source : Cahier technique Entre forêts et pelouses - Habitat de reproduction du tétras-lyre

La période optimale pour réaliser le diagnostic sur le terrain est la première quinzaine de juillet. Elle correspond à la période critique d’élevage des jeunes où la végétation offre un couvert de sécurité et des ressources alimentaires.

Comment ?

Le territoire d’étude identifié est divisé en mailles d’un hectare. Un code correspondant aux 3 types d’habitats est attribué à chaque maille. Les critères utilisés pour attribuer ce code sont : la composition, la hauteur, l’humidité et le recouvrement de la strate « herbacée-éricacée », et la répartition spatiale des ligneux présents. Des informations comme les espèces ligneuses dominantes peuvent compléter le diagnostic.
 

Une fois les codes attribués aux mailles, la répartition des mailles favorables est examinée. Elle permet d’évaluer les possibilités de connexion et d’extension de ces mailles. Des travaux de réouverture au niveau des mailles potentiellement favorables peuvent ensuite être réalisés pour obtenir un habitat optimum pour les jeunes tétras-lyres. Ces travaux peuvent être mis en œuvre par des entreprises réalisant des travaux mécaniques (débroussaillage par exemple) ou par l’action des troupeaux menés par les bergers.

Définition de l'habitat optimum

L’habitat optimum correspond à un ensemble de 20 mailles d’habitat favorable. Le suivi télémétrique de poules tétras-lyre a montré que les oiseaux occupent, en fonction des milieux, une surface de 4 à 40 ha pendant la période de reproduction et d’élevage des jeunes. La surface d’habitat optimum a ainsi été normée à 20 ha.

Des protocoles complémentaires

Une méthode d’évaluation plus poussée de la dynamique des végétaux ligneux peut compléter le diagnostic. En cours de test, elle intègre notamment la capacité des troupeaux domestiques à intervenir au sein des milieux. Un protocole portant sur les orthoptères, première ressource alimentaire des jeunes poussins, peut aussi être appliqué pour évaluer la capacité alimentaire du milieu pour le tétras-lyre. Ce protocole repose sur 2 volets : la détermination de la biomasse orthoptérique et un inventaire des espèces présentes au sein d’une station d’échantillonnage de 25 m² placée dans un milieu fréquenté par le tétras-lyre.
 

À propos du programme Agrifaune

Piloté par les Chambres d’agriculture de France, l'Office français de la biodiversité (OFB), la Fédération nationale des chasseurs, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, Agrifaune développe et valorise des pratiques agricoles conciliant agronomie, économie, environnement et faune sauvage. Il mobilise agriculteurs et gestionnaires d’espaces agricoles afin de mettre en place des pratiques en faveur de la biodiversité. L’OFB attribue les subventions aux partenaires régionaux et locaux pour la réalisation des projets Agrifaune et assure leur suivi.

Contacts

  • Estelle Lauer : estelle.lauer (a) chasse38.com
  • Margot Petit Dit Dariel : margot.petitditdariel (a) alpages38.org
  • David Granger, animateur national du programme Agrifaune à l’OFB : david.granger (a) ofb.gouv.fr

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