Réseau Bécasse
Le réseau Bécasse collecte des informations sur l’état de la population des Bécasses des bois en France. Près de 450 membres actifs capturent et marquent des milliers d’oiseaux chaque année sur tout le territoire. Ces informations servent au suivi de la population via des indices d’abondance, les âges-ratios ou des taux de survie. Un suivi des effectifs nicheurs est aussi mis en place chaque printemps, ainsi que l'étude de la migration grâce aux balises. Le réseau est également à l’origine d’un prélèvement maximum autorisé (PMA) sur l’espèce et accompagne son application.
Espèce suivie : la Bécasse des bois
La Bécasse des bois (Scolopax rusticola) est une espèce emblématique pour de nombreux passionnés de faune sauvage.
Contrairement aux autres limicoles, c’est le seul à être strictement inféodé aux milieux forestiers durant l’intégralité de son cycle annuel. Elle quitte les boisements seulement pour s’alimenter la nuit en milieux ouverts, lorsque la nourriture en forêt n’est plus suffisante pour subvenir à ses besoins (notamment en automne et en hiver). Cryptique, elle est très difficile à observer ou photographier, sauf quand le froid conduit les individus à s’exposer davantage pour s’alimenter d’invertébrés essentiels à son régime alimentaire.
La Bécasse des bois est présente sur tout le continent européen et même jusqu’en Asie. Espèce migratrice, ses zones de reproduction principales se situent en Russie, Europe Centrale et Scandinavie. La France se situe en limite occidentale de cette zone de reproduction. En automne-hiver, poussées par des conditions climatiques hostiles, les bécasses se réfugient en Europe de l’Ouest et sur le pourtour méditerranéen.Particulièrement prisée par les chasseurs de petit gibier, plusieurs millions d’individus sont prélevés chaque année dans toute l’Europe. L’étude de la dynamique des populations est ainsi très important, pour l’espèce mais aussi pour celles dans des situations proches. La Bécasse des bois est considérée comme un « modèle d’étude » pour mieux comprendre les mécanismes qui permettent à certaines espèces de se maintenir malgré des prélèvements importants, alors que d’autres déclinent.
Aller plus loin : consulter la fiche espèce
Bécasse des bois (Scolopax rusticola) | Fiches Espèces | octobre 2024
La Bécasse des bois est un oiseau limicole particulier car c’est le seul de sa famille à ne pas être dépendant des zones humides. Espèce migratrice, elle se cache le jour dans les bois où son plumage lui permet de se confondre avec le sous-bois.
Objectifs du réseau Bécasse
Grâce à l’intérêt partagé pour l’espèce cible par de nombreux organismes, le réseau Bécasse permet de mobiliser un grand nombre d’acteurs et ainsi de disposer d’un volume de données sans équivalent sur l’ensemble du territoire métropolitain.
Ces données servent ensuite aux scientifiques s’intéressant à la dynamique de populations des espèces migratrices exploitées pour :
- évaluer périodiquement l’évolution démographique de l’espèce,
- identifier et quantifier les mécanismes influençant cette démographie et
- proposer des mesures de gestion utiles et réalisables, pour la Bécasse des bois mais aussi pour d’autres espèces concernées par les mêmes enjeux.
Il s’agit donc d’un suivi à long terme dont la finalité pratique est d’améliorer la gestion des espèces exploitées par les humains.
Organisation des activités
Le suivi dans le cadre du réseau s’organise autour de deux axes
Le suivi des effectifs nicheurs via le recensement des mâles à la croule
La croule est un comportement du mâle en période de reproduction, c'est un vol accompagné de cris caractéristiques. Il permet de suivre l’évolution des effectifs nicheurs en France et mobilise 500 observateurs. Chaque année, entre le 15 mai et le 30 juin, ces vols nuptiaux sont comptabilisés au crépuscule sur 600 points d’écoutes tirés au sort parmi les habitats susceptibles d’accueillir l’espèce.
Le suivi des effectifs migrateurs et des hivernants par la capture et le baguage
Cette activité se déroule d’octobre à fin mars et fait appel à près de 450 bagueurs spécialistes et formés, répartis dans tous les départements français. La base de données française est la plus importante sur l’espèce dans le monde, avec près de 170 000 oiseaux bagués et 40 000 reprises et contrôles de bagues. Les oiseaux sont capturés et identifiés par la pose d’une bague associée à un numéro unique. La méthode de capture-marquage et idéalement recapture permet d’étudier les effectifs migrateurs et hivernants.
En complément, un indice d’abondance nocturne (nombre de bécasses vues par unité de temps de prospection) est recueilli. Il permet de suivre l’évolution de l’abondance relative et de la répartition géographique des bécasses.
Que faire si vous trouvez une bague métallique sur une bécasse ?
La richesse de la base de données repose notamment sur les informations fournies par la récupération de chaque bague trouvée, quel que soit le contexte. Il est donc particulièrement important de les transmettre au réseau Bécasse, avec les précisions associées :
- par mail à reseau.becasse (a) ofb.gouv.fr,
- avec mention des informations essentielles :
- numéro de la bague, et joindre une photo de la bague aplatie,
- date (JJ/MM/AAAA) et localisation où la bague a été trouvée : commune et département, lieu-dit/coordonnées GPS du prélèvement,
- Informations complémentaires :
- poids de la bécasse,
- observateur : nom et prénom, mail du contact.
Accompagner l'application de la règlementation : le prélèvement maximal autorisé
Sous l’impulsion des associations de chasseurs spécialisées, le réseau Bécasse a apporté son appui à la mise en place d’une limitation des prélèvements de bécasses.
Depuis la saison de chasse 2011-2012, un prélèvement maximal autorisé (PMA) est instauré en France pour la Bécasse des bois. Ce PMA limité à 30 bécasses par an et par chasseur au niveau national est ensuite décliné au niveau départemental par d’autres règles hebdomadaires ou journalières (par exemple une limite de 3 prélèvements par semaine dans de nombreux départements). L’application de cette règlementation est permise grâce à l’utilisation du « carnet bécasse », qui peut être dématérialisé.
Les statistiques issues des données de prélèvements sont étudiées chaque année et font l’objet d’un rapport annuel publié sur le site de l’OFB. Le PMA Bécasse est un outil de gestion, évolutif et ajustable selon l’état de conservation de l’espèce.
Suivre le déroulement des migrations grâce aux balises
Depuis 2015, l’OFB et le CNB se sont associés pour équiper des bécasses d’émetteurs permettant leur localisation par satellite. Ces données sur la migration prénuptiale et postnuptiale vont permettre d’étudier de manière plus fine les facteurs influençant le départ en migration, les haltes migratoires, et l’origine géographique des oiseaux présents en France en hiver et plus généralement les voies de migrations européennes.
Historique et organisation du réseau
Ce réseau national a été créé en 1985 et fait suite à la « section bécasse » de l’ONC (Office national de la chasse). Elle était initialement dédiée à la récolte d’ailes pour évaluer certains paramètres démographiques comme la proportion de juvéniles et la proportion de mâles/femelles. Elle intervenait auprès des chasseurs spécialisés, notamment du Club national des bécassiers (CNB).
Le réseau Bécasse a peu à peu recentré son activité sur le baguage en automne/hiver pour évaluer les taux de survie annuels, et sur le suivi des effectifs nicheurs sur l’ensemble de la France métropolitaine.
Un lien fort avec les fédérations départementales de chasseurs (FDC) et les associations de chasseurs spécialisés (CNB, Bécassiers de France - BDF) caractérise ce réseau multipartenarial. D’autres organismes participent aussi activement à la collecte des données, comme l’Office national des forêts (ONF), ainsi que de nombreux bénévoles et ornithologues. Les autorisations de captures sont délivrées par le Muséum national d’histoire naturel de Paris et son antenne spécialisée sur les oiseaux (Centre de recherche sur la biologie des populations d’oiseaux CRBPO) dans le cadre d’un programme spécifique animé et piloté par l’OFB.
Contact
Courriel : reseau.becasse (a) ofb.gouv.fr
Office français de la biodiversité - Réseau Bécasse
Adresse : 8 bd Albert Einstein, 44300 Nantes
Résultats et ressources
Des résultats scientifiques pour mieux connaître l'espèce
Les résultats obtenus grâce à cette force particulière du réseau, et sa base de données exceptionnelle sur la Bécasse des bois, permettent d’étudier et de suivre les effectifs nicheurs en France, ainsi que la répartition et l’évolution de la population hivernante et migratrice. Des travaux et publications sont également réalisés dans le cadre de collaborations scientifiques. Voici l'état des connaissances actuelles.
La population nicheuse
Une étude menée par Boussac L. (2018) a porté sur les 30 dernières années de suivi des effectifs nicheurs par l’observation de la croule. Elle a mis en évidence une chute de 30 % des effectifs nicheurs et une contraction de l’aire de nidification, notamment dans les Pyrénées et les Alpes. Cette diminution rapide jusqu’aux début des années 2000 s’est depuis ralentie.
La population migratrice et hivernante
L’évolution de l’indice d’abondance nocturne (IAN) depuis les années 1990 montre une tendance stable, voire peut-être à la hausse, des effectifs migrateurs et hivernants en France. Un indice cynégétique d’abondance (ICA, nombre de bécasses vues par sortie de chasse), calculé à partir des données collectées par les chasseurs spécialisés (CNB et BDF) lors de leurs sorties de chasse, présente la même tendance.
Survie annuelle des bécasses
Une analyse des données de baguage indique des taux de survie annuels des bécasses compris entre 33 % et 61 % selon la pression de chasse et l’âge des oiseaux, adultes versus juvéniles (Péron et al. 2012). Le taux d’accroissement de la population a alors été estimé à 1,16 (1990-2008).
Une analyse publiée dans le Bécasse infos n° 31 (Rézouki C., 2022) montre que les taux de survie ont poursuivi leur augmentation sur la période 2008-2020. L'évolution liée aux changements climatiques semble offrir de meilleures conditions d’hivernage dans tout le pays, y compris dans les régions du Centre, du Nord et de l’Est.
Origine géographique des migratrices et hivernantes
Le baguage a aussi permis de déterminer en partie l’origine géographique des oiseaux et montre que les bécasses hivernant en France proviennent majoritairement de la Russie européenne, de l’Europe centrale et de la Fenno-Scandinavie.
Ressources disponibles
Bécasse infos - Lettre n° 33 |
La lettre d’information annuelle du réseau Bécasse revient sur les résultats obtenus durant la saison 2023-2024. Cette lettre n°33 présente le bilan des plus de 11 000 données de capture, récoltées au cours de l’hivernage des bécasses, ainsi que les analyses de la nidification 2024. Elle expose également les premiers résultats de l’étude des stratégies d’hivernage de la Bécasse des bois en milieu méditerranéen, et donne les dernières nouvelles des individus équipés de balises GPS.
Bécasse Flash info - n° 1 - Saison 2023/2024 |
Ce premier Flash-info de la saison 2023-2024 fait le point sur les conditions météorologiques de l’automne ayant influencé la migration postnuptiale des bécasses. Les premiers résultats bruts de captures sont présentés. Grâce à ces données, les indices d’abondances nocturnes et âges-ratios sont également mis en valeur par rapport aux autres saisons de capture.
Lettres et synthèses du réseau
Lettre d’information et synthèses du réseau Bécasse | Page éditoriale
Bibliographie citée
- Rézouki C. (2022), Variation de la survie hivernale en France des bécasses des bois, Bécasse infos - Lettre d'information du réseau Bécasse n°31, P. 4-6 – Octobre 2022
- Boussac L. (2018) Abondance, distribution et tendance des effectifs nicheurs entre 1998 et 2018, Bécasse infos - Lettre d'information du réseau Bécasse n°27, P. 6-7 – Octobre 2018
- Péron G., Ferrand Y., Choquet R., Pradel R., Gossmann F., et al.. Spatial heterogeneity in mortality and its impact on the population dynamics of Eurasian woodcocks. Population Ecology, 2012, 54, pp.305 - 312.
Articles techniques
- Dossier (2014) : Gestion des prélèvements de la bécasse des bois, Faune sauvage, 305
- Le prélèvement maximal autorisé : bilan de 2 années d’application à l’échelle nationale
- Estimation du tableau de chasse annuel : l’approche de la région Aquitaine
- Ferrand Y., Gossmann F., Leray G. (2013). Un partenariat de longue durée sur la bécasse et les bécassines en Russie européenne, Faune sauvage, 300
- Réseau Bécasse (2012). Suivi des populations de bécasses des bois migratrices, hivernantes et nicheuses en France - Période 2002-2012, Faune sauvage, 297
- Ferrand Y. (2009). PMA Bécasse en Bretagne : bilan de trois années d’application, Faune sauvage, 286
- Ferrand Y., Gossmann F. (2007). Suivi de la bécasse des bois en Russie européenne - Bilan sur 15 ans et perspectives, Faune sauvage, 276
- Réseau Bécasse ONCFS/FNC - Suivi en temps réel des effectifs de bécasses en migration et en hivernage, Faune sauvage, 272
- Ferrand Y., Piel B., (2006). Un PMA régional pour la chasse de la Bécasse des bois en Bretagne, Faune sauvage, 270