Estuaires, deltas, lagunes, mangroves... les milieux de transition

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Tourbières, marais et prairies salées (schorres), vasières dont les slikkes recouverts d’eau salée à chaque marée, estuaires…  Entre terre et mer, toutes ces zones humides littorales représentent des milieux extrêmement riches tant en termes de biodiversité que de fonctionnalités. Décriées par le passé, il est incontestable aujourd'hui qu'elles nous protègent et nous nourrissent. Réservoirs incomparables de biodiversité, elles absorbent une partie des pollutions humaines et favorisent les activités en aval (pêche, conchyliculture...). Elles atténuent les phénomènes type crues des fleuves et submersions marines et jouent un rôle essentiel dans la lutte contre les effets des dérèglements climatiques.

En bref

  • Les estuaires et les deltas se trouvent à l’exutoire des fleuves.
  • Les lagunes sont des plans d’eau côtiers, plus ou moins connectés avec la mer.
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Estuaire de la baie de Somme et sa végétation de schorre (Laurent Mignaux, Terra)

Un fonctionnement hydrosédimentaire spécifique à chaque milieu

Soumis à l'influence à la fois de l’eau douce et de la marée, les estuaires, lagunes et deltas sont des zones de transition, à la frontière entre les eaux continentales et les eaux côtières. Ces écosystèmes particuliers sont dotés d’un fonctionnement écologique spécifique, avec des caractéristiques morphologiques et hydrologiques très variables selon la dominance de l'un ou l'autre de ces forçages naturels. Assurant des fonctionnalités écologiques indispensables, ces milieux particulièrement riches sont soumis à différentes pressions d'origine humaine.

Les estuaires, des zones à fortes variations du niveau de l'eau

Dans l'Hexagone, les estuaires sont uniquement présents sur la façade Atlantique, la Manche et la mer du Nord.

Ces milieux peuvent être très étendus sur plusieurs centaines de kilomètres, la limite amont se situant à l’endroit où commence l’influence de la marée et sa limite aval correspondant à l’exutoire du fleuve.
Soumis au balancement des marées, le niveau d’eau des estuaires oscille au rythme des cycles de basse mer et de pleine mer. Les estuaires se distinguent en fonction de l'amplitude du marnage, différence de hauteur d’eau entre la basse mer et la pleine mer.
La salinité de ces milieux varie de l’amont vers l’aval. Les estuaires, grandement influencés par la marée, se caractérisent par des gradients de salinité longitudinaux et verticaux plus ou moins prononcés.

Dans les estuaires français, les particules sédimentaires apportées par les cours d'eau, majoritairement des sédiments fins, peuvent s'accumuler à proximité de l'embouchure. Une zone de turbidité maximale se forme généralement en amont de l'intrusion saline, appelée le "bouchon vaseux".
Dans les zones peu soumises à l’influence de la marée, ces particules sédimentaires s’accumulent et forment les deltas.

Aller plus loin

Qu'est-ce qu'un estuaire ? | Page éditoriale

Les estuaires, comme les deltas, se trouvent à l'exutoire des fleuves. Soumis à de multiples influences entre l'eau douche et l'eau salée, ce sont des milieux de transition très complexes, aux fonctionnalités écologiques indispensables mais sous pression des activité humaines.

Estuaires / AFB - GIP Seine Laval

Les deltas, les zones à faible amplitude de marée

Le delta se forme lorsque la marée est trop faible pour bloquer les sédiments du fleuve. Ces sédiments s’accumulent à son embouchure et forment des dépôts émergés.
Peu soumis à la marée, le delta offre des conditions plus stables. La salinité est faible dans la partie amont, soumis aux crues du fleuve. A l’aval, la salinité est plus importante et peut être accentuée par l’évaporation et par les entrées d’eau de mer lors des tempêtes.

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La lagune de la Belle Henriette compte 360 espèces végétales (Guillaume Paquignon, OFB)

Sur le littoral méditerranéen pour l'Hexagone, le Rhône forme un grand delta et le littoral est découpé en plusieurs lagunes. Ils sont absents de la façade Atlantique et mer du Nord dans l'Hexagone.

Les lagunes, des plans d'eaux aux conditions fluctuantes

Ces étendues d’eau sont séparées de la mer par un cordon littoral, découpé par endroit, et sont ainsi alimentées en eau :

  • douce par un ou plusieurs cours d'eau
  • salée par une ou plusieurs ouvertures à la mer, dites « grau » ou chenal.

Dans les lagunes, la salinité est maximale à proximité des chenaux reliant la lagune à la mer, et décroît en se rapprochant des affluents. Elle est donc plus ou moins forte selon le degré de connexion à la mer, distinguant deux grandes catégories : les lagunes oligo-mésohalines (peu salées) et poly-euhalines (salées). En outre, la salinité évolue au cours de l’année puisque celle-ci augmente l’été avec l’évaporation et diminue en hiver avec l’augmentation des apports d’eau douce.

Au-delà de la salinité et de la turbidité, l’ensemble des paramètres caractérisant ces milieux fluctue dans le temps et l’espace : nutriments, oxygène dissous... Ils sont influencés à la fois par des facteurs naturels et anthropiques.

En outre-mer, des écosystèmes spécifiques au rôle fonctionnel essentiel : mangroves, marais, lagons, récifs...

À l’embouchure des cours d’eau ultramarins, certains estuaires ont la particularité d’être occupés par des mangroves. Ces forêts tropicales sont constituées de palétuviers, ­­­des arbres capables de se développer sur un sol c­­­­­onstamment gorgé d’eau salée notamment grâce à des racines aériennes. Ils constituent ainsi des habitats pour diverses espèces animales terrestres ou marines, comme les dauphins, des oiseaux et de nombreux poissons, mollusques et crustacés.

Les territoires français ultramarins abritent également de nombreuses zones humides littorales : les marais littoraux, ou vasières. Ces écosystèmes sont caractérisés par la présence d’herbacées et d’un sol hydromorphe vaseux. Ils sont sous l’influence de bon nombre de processus côtiers : marnage déterminant les paramètres de submersion, salinité de l’eau, mouvements sédimentaires… Quand elle est colonisée par la forêt, la vasière devient une mangrove.

Les lagunes côtières ultramarines, plus ou moins saumâtres, sont des plans d’eau séparés de la mer par un cordon sableux, ou par un récif corallien et forment alors un lagon.

Les récifs coralliens et les fonds marins inférieurs ou égaux à 6 m de profondeur appartiennent eux aussi, selon la définition Ramsar, aux zones humides.

L’ensemble des ces habitats constituent des écosystèmes diversifiés, offrant de nombreux services aux espèces marines comme terrestres et aquatiques. A l’interface terre-mer, ils jouent également des rôles importants dans la lutte contre les dérèglements climatiques : piégeage du carbone, lutte contre les évènements extrêmes et l’érosion du trait de côte.

Aller plus loin : les typologies de zones humides d'Outre-mer (pôle-relais Zones humides tropicales)

Et tout un ensemble d'autres milieux humides

Milieux humides, entre richesse et fragilité | Rubrique

Tourbières, mares, prés salés, forêts alluviales… sont autant de termes qui illustrent la diversité des zones humides. Elles abritent une biodiversité exceptionnelle et assurent de nombreux et primordiaux services envers la société. Particulièrement menacées, dégradées ou en régression, 87% des zones humides ont disparu depuis le XVIIIe siècle et la moitié entre 1960 et 1990. L'enjeu de préservation est crucial. Améliorer leur connaissance est indispensable.

Zone humide de la queue du lac de Saint-Point, un des plus grands lacs naturels de France (Sébastien Lamy, OFB)
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Sargasses et laitues de mer (Ulva lactuca) des lagunes méditerranéennes avec goélands leucophées (Larus michahellis) (Yannick Gouguenheim, Image & Rivière)

Des fonctionnalités écologiques indispensables

Les milieux de transition assurent un grand nombre de fonctions écologiques ou services écosystémiques relatifs aux :

  • flux de matière et d'énergie : dégradation, transformation et/ou stockage des matières issues du domaine fluvial et maritime, atténuation des crues fluviales et des submersions marines en absorbant une partie de l’excès en eau, la lutte contre les effets des dérèglements climatiques (stockage du carbone, atténuation des impacts des événements climatiques extrêmes, lutte contre l’érosion du trait de côte…).
  • cycle de vie des espèces : fonctions de nurserie, d’alimentation, de reproduction et de refuge pour diverses espèces, notamment oiseaux et poissons, en particulier les poissons migrateurs amphihalins  dont le cycle de vie est partagé entre les eaux marines et continentales.

Quelles menaces pèsent sur ces milieux ?

Les zones à l’interface terre-mer sont particulièrement vulnérables aux impacts du changement climatique, notamment par la montée du niveau de la mer et la diminution des apports en eau douce.
Elles constituent également des territoires à forts enjeux stratégiques pour le secteur économique (activités portuaires et industrielles, agriculture, transport, pêche professionnelle, conchyliculture) et les implantations urbaines.

Le développement des activités humaines le long du continuum terre-mer peut engendrer des perturbations qui menacent la qualité écologique et chimique des eaux de transition et par conséquent, le fonctionnement global de ces écosystèmes.

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    Rotodévaseur, technique de curage par agitation qui remobilise et disperse les sédiments dans le milieu aquatique, estuaire de la Gironde (François Colas, OFB)
    Modification de la dynamique sédimentaire avec :
    • augmentation des apports entrants : rejets directs, érosion des sols agricoles nus,
    • remobilisation de matières en suspension (MES) lors de dragages (extraction des sédiments pour l’entretien des chenaux par exemple) ou d’immersion (rejets en mers des boues issues de dragage) pour la navigation. Ces apports excessifs en MES, auxquelles des contaminants chimiques sont associés, peuvent impacter le fonctionnement biologique, géochimique et hydro-morpho-sédimentaire de ces milieux.
  • Augmentation des flux de nutriments en provenance des bassins versants. Ces apports excessifs peuvent notamment engendrer des phénomènes d’eutrophisation, enrichissement en nutriments à l’origine de blooms phytoplanctoniques et de désoxygénation du milieu.
  • Propagation d’espèces exotiques qui peuvent être invasives. L’implantation fréquente de ports dans les estuaires, constitue des "portes d'entrée" pour les espèces exotiques. La proportion d’espèces introduites peut être importante par rapport aux espèces dites "autochtones".

État des milieux marins et littoraux (naturefrance.fr)

Ressources

Comprendre les milieux estuariens pour mieux les préserver | Page éditoriale

Soumis à l'influence du fleuve d'une part et de la marée d'autre part, les estuaires possèdent des caractéristiques morphologiques et hydrologiques très variables selon la dominance de l'un ou l'autre. Cette complexité écologique source de richesse croise de forts enjeux économiques, sources de pressions. Des connaissances générales sur les estuaires sont complétées d'éléments scientifiques, ainsi que d'outils pour une meilleure compréhension et gestion de ces milieux de transition.

 

Estuaire de la Canche (Laurent Mignaux, Terra)

Toute la documentation disponible sur ce site

Tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata) | Fiches Espèces |

La Tortue imbriquée est une espèce menacée et protégée de tortue marine qui vit en eau peu profonde sur des zones de type récifs. Cette espèce migratrice se rend à terre pour pondre lors de la saison de reproduction, tous les 2 à 3 ans.

Saumon atlantique (Salmo salar) | Fiches Espèces |

Le saumon atlantique, Salmo salar L., est une espèce de la famille des salmonidés et de la sous famille des salmoninés. Encore présent sur de nombreux cours d’eau et fleuves de la façade Manche-Atlantique française et de Saint-Pierre-et-Miquelon, le saumon atlantique vit en eau douce jusqu’au stade smolt (passage en mer). Carnivore, il se nourrit de larves d’insectes en eau douce, zooplanctons, crustacés et poissons en mer.

Globicéphale noir (Globicephala melas) | Fiches Espèces |

Le Globicéphale noir est un mammifère marin pesant entre 1 000 et 2 300 kg et mesurant de de 4 à 7 mètres. Cette espèce protégée vit en groupes de 10 à 100 individus, même si des groupes de plus de 1 000 individus peuvent exister.