Restauration des plans d’eau

Contexte général 

Alors que les mesures de compensation écologique des milieux dégradés sont encouragées par les politiques publiques (séquence ERC - Ministère de la transition écologique et solidaire 2018), aux niveaux national et international (Commission Européenne, 2000 ; Society for Ecological Restoration International Science & Policy Working Group. 2004), l’écologie de la restauration souffre de manques de retours d’expériences et de jeux de données suffisamment importants et standardisés pour évaluer les trajectoires écologiques des écosystèmes restaurés. Ceci est particulièrement vrai pour les écosystèmes d’eau douce qui accueillent une biodiversité disproportionnée eu égard à leur représentation (Dudgeon et al., 2006), mais qui subissent de fortes pressions anthropiques liées aux services qu’ils rendent (Tolonen and Hamalainen, 2010 ; Reynaud and Lanzanova, 2017), en particulier les plans d’eau.

Face à l’absence de méthodes standardisées préconisées, les suivis d’efficacité écologique de restauration sont le plus souvent très limités, voire inexistants. Ce déficit limite fortement les possibilités d’appuis scientifiques et techniques aux gestionnaires pour orienter les mesures à mettre en œuvre.

Il est ainsi très difficile de savoir si les milieux restaurés sont propices à héberger des peuplements viables sur le long terme, ce qui peut être directement lié à l’ingénierie de la restauration pratiquée, mais aussi aux capacités de recolonisation des espèces, au temps nécessaire à leur établissement ; la diversité génétique et les capacités physiologiques des individus introduits vont jouer un rôle important.

Enjeux opérationnels 

Afin de capitaliser des retours d’expérience étayés sur l’impact des restaurations (Marchand et al., 2017), il s’agit de :

  • développer des méthodes opérationnelles standardisées de suivi écologique des actions de restauration des rives et du littoral des plans d’eau qui permettront d’attester rigoureusement du succès ou non d’une opération de restauration ;
  • accompagner les gestionnaires dans leur appropriation,
  • proposer une bancarisation des données récoltées,
  • analyser ces données et interpréter les résultats.

En mobilisant au niveau national les gestionnaires pour déployer les protocoles de suivi standardisés sur le plus grand nombre de sites possible, de nombreux retours d’expérience seront capitalisés pour orienter les choix d’action à venir.

Par ailleurs, de plus en plus de gestionnaires se tournent vers des structures artificielles pour essayer de pallier le déficit d’habitats littoraux favorables (Jeudy et al., 2012a ; Jeudy et al., 2012b), lié au marnage artificiel dans de nombreuses retenues. Etre en mesure d’établir des recommandations sur la spécification des structures (dimensionnement, propriétés…) pour un résultat optimal serait un réel plus pour eux et la biodiversité. Cela passe par des études détaillées multi-compartiments de l’impact de ces structures sur les milieux.

Le lac de Serre-Ponçon constitue un site atelier au travers du projet UROS (détails projet et thèse CIFRE en cours, courte vidéo de présentation - août 2020, photo ci-dessous) ; d’autres projets similaires, encore à l’état embryonnaire à ce jour, pourraient émerger avec la CACG et EDF, tous deux intéressés par cette expérimentation.

 

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Visite de l'installation du projet UROS, Lac de Serre-Ponçon, septembre 2021 (Christophe Ferrier/OFB)


Sur le long terme, les suivis opérationnels mis en place permettront d’estimer si la restauration a des effets durables. Cette durabilité peut aussi être vue sous l’angle de la diversité génétique. Dans les systèmes aquatiques stagnants, le flux de gènes est limité et la diversité génétique des roselières est faible (Čurn 2007, Paul 2011). La restauration des roselières pourrait conduire à épuiser la diversité génétique à la suite des effets fondateurs. La conséquence pourrait être l’affaiblissement du potentiel adaptatif et donc une augmentation du risque d’extinction des populations réintroduites face à de futures perturbations environnementales (changement climatique par exemple).

Le succès des restaurations de roselières à long terme dépend de leurs caractéristiques génétiques et écophysiologiques. Une faible diversité génétique diminue la capacité d’adaptation des populations et la stabilité des écosystèmes. Des difficultés à stocker des réserves carbonées peuvent avoir une influence sur la capacité des plantes à régénérer tout de suite après l’implantation, mais également à supporter des perturbations à plus long terme. De plus Phragmites australis présente des niveaux variables de ploïdie (4x, 6x, 8x...) qui peuvent modifier le développement végétatif de la plante (hauteur et nombre de tiges, largeur des feuilles) et également la production de graines (Meyerson et al. 2016). Ces différences d’investissement entre multiplication végétative et reproduction sexuée peuvent altérer l’efficacité du succès de réintroduction à court terme mais aussi le maintien de la diversité génétique à moyen ou long terme (Albert et al. 2015). Les caractéristiques environnementales (trophie, courant…) et intrinsèques aux individus (adaptation physiologique, niveau ploïdie…) modifient la capacité des plantes à constituer des réserves carbonées (Karunaratne et al. 2004).

Il s’agira ensuite de fournir des recommandations de restauration prenant en compte des aspects de génétique des populations.

Méthode de suivi standardisé pour les opérations

Depuis 2016, le pôle R&D ECLA « Ecosystèmes lacustres » propose un cadre visant à harmoniser les suivis des actions d’amélioration des habitats en zone littorale des plans d’eau à l’échelle nationale et à alimenter les connaissances concernant leurs effets sur le milieu.
 

Collaborations externes

  • L’ensemble des DIR OFB
  • Gestionnaires : Fédérations de pêche, EDF, CACG, syndicats mixtes, EPTB, Départements...
  • Bureaux d'études : ECOCEAN

Publications et rapports


(Dernière mise à jour : septembre 2021)

En savoir plus

Le réseau de sites de démonstration | Projet

Le projet « Sites de démonstration » a été conçu pour mettre en œuvre, sur tout un réseau de sites d’opérations de restauration hydromorphologique, un suivi standardisé - le suivi scientifique minimal (SSM) - permettant d’acquérir sur le long-terme des données homogènes et traçables.

Localisation des sites de démonstration pour la restauration hydromorphologique des cours d'eau en 2021

Méthode de suivi standardisé pour les restaurations hydromorphologiques | Page éditoriale

Développement d’une méthode de suivi standardisé pour les opérations de restauration hydromorphologique des zones littorales des plans d’eau - application à l’échelle nationale.